Jouer au football à haut niveau et travailler à côté, c’est une réalité pour l’élite des joueuses suisses. À l’étranger, le football professionnel féminin est parfois bien plus en avance. D’anciennes joueuses et d’autres encore actives en parlent dans le podcast «Steilpass».
Le premier article de blog sur ce podcast mettait l’accent sur les aspects d’égalité et de conciliation. L’animatrice Sara Akanji s’est entretenue avec Lara Dickenmann, Toja Rauch et Cinzia Zehnder au sujet de la situation actuelle du football féminin suisse. Et une chose est sûre, il existe des disparités entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les pays. Martina Moser, Lia Wälti et Lara Dickenmann nous font part de leurs expériences à l’étranger.
Martina Moser a pris sa retraite internationale en 2017, après une carrière de 21 ans au sein de l’équipe nationale suisse. Jouer au football à plein temps ou «en à-côté», elle a vécu les deux situations. Pendant trois ans, elle faisait la navette entre son poste à 80% à Berne et son club de football à Fribourg (Allemagne). Puis elle a rejoint l’équipe de Wolfsburg (Allemagne). Professionnelle pour la première fois, elle a enfin eu le temps de se consacrer pleinement au football, un moment marquant dans sa carrière. «Cela n’aurait pas été possible en Suisse».
«Notre prochain objectif, c’est un taux d’occupation de 50% pour toutes les joueuses».
Lia Wälti, en Ligue nationale A depuis 2011 et sous contrat avec l’Arsenal Women FC (en anglais) depuis 2018, confirme: contrairement à la Suisse, son quotidien de footballeuse à Londres ressemble beaucoup à celui des hommes. «Nous pouvons utiliser le même terrain d’entraînement. Il est immense. Il y a une super salle de sport, une piscine, un suivi médical professionnel, des physiothérapeutes, des psychologues du sport – c’est idéal. Par ailleurs, nous sommes sur le terrain de 9 à 15 heures et pas simplement après le travail». Ce sont des conditions dont les footballeuses en Suisse ne peuvent que rêver.
L’aspect financier joue un rôle important. «En Angleterre, il y a beaucoup plus d’argent pour le football féminin, et les droits de télévision sont bien plus élevés qu’en Suisse. Là-bas, tout le monde ou presque est fan de foot, c’est profondément ancré dans la culture», explique Martina Moser. Et Lia Wälti ajoute: «La couverture médiatique est bien plus large qu’en Suisse. Le sacre des Anglaises à l’Euro 2022 a été un véritable tremplin. Maintenant, nous jouons parfois à guichets fermés dans les mêmes stades que les équipes masculines, et les footballeuses sont sollicitées pour des sponsorings attrayants. Même ici, en Angleterre, cela aurait été impensable il y a encore cinq ans».
«Parfois, on aimerait pouvoir se concentrer encore plus sur le football et moins sur tout ce qu’il y a autour».
Toutefois, Lia Wälti observe également des progrès en Suisse. «Nous bénéficions d’un soutien de plus en plus large, c’est très motivant. Et nous avons réussi à faire adhérer beaucoup de monde au football féminin. Mais parfois, on aimerait bien pouvoir se concentrer encore plus sur le football et moins sur tout ce qu’il y a autour».
«Au moins, nous pouvons désormais proposer un logement aux joueuses à Zurich», lance Lara Dickenmann, qui a également joué aux États-Unis, en France et en Allemagne durant sa carrière. «Avoir un logement gratuit ou à bas prix sur place est un grand soulagement. Notre prochain objectif, c’est que toutes les joueuses puissent réduire leur taux d’occupation à 50%. Elles pourraient ainsi consacrer plus de temps et d’énergie au football, y compris en journée. Les sponsorings sont évidemment un élément clé pour y parvenir».
Toutes les trois sont d’accord sur ce point: il faut avant tout de meilleures conditions pour la relève dans le football féminin suisse. Et Lia Wälti précise: «Il ne s’agit pas du tout d’avoir le même salaire que les hommes, mais des conditions comparables. C’est indispensable pour avoir un football professionnel».
«Les jeunes joueuses méritent de meilleures infrastructures, plus d’entraîneurs et plus de ressources. Les clubs, la fédération, les cantons et les communes doivent agir».
Pour l’avenir, Lara Dickenmann souhaite que les femmes soient pleinement intégrées dans le football suisse. «À ce moment-là, la distinction entre football féminin et masculin n’aura plus lieu d’être.» Martina Moser approuve: «Dans la sphère économique comme dans le sport, le genre des personnes ne devrait pas être un motif de différence. Seule la performance devrait compter. Un jour, le football féminin sera complètement normal, une évidence, et non plus un sujet de discussion.»